Cela fait maintenant un an que nous sommes sur les routes. Plus de 8 200 km parcourus depuis l’Alaska jusqu’au Mexique. 12 mois. C’est long et tellement court à la fois. Nous avons l’impression d’être partis hier et pourtant, le monde que nous avons quitté nous paraît lointain.
Un an loin des siens
Après avoir vécu, étudié et/ou travaillé dans différents pays, on savait déjà que les personnes qui comptent, restent. Que la distance est là, mais qu’elle ne gâche pas la relation, voire même au contraire, parfois elle rapproche. Internet aide grandement à maintenir le contact mêmes si les visites restent bien sûr l’option préférée !
Un an tous les 4 – Ensemble c’est tout
Voyager en famille si longtemps, c’est intense. Nous sommes toujours ensemble. Et pourtant, on ne se marche pas dessus non plus. Car notre espace de vie n’a pas de limites et que nous sommes constamment occupés : par la recherche d’eau, de nourriture, d’un endroit où dormir, du campement à monter, à démonter, de la préparation des repas, du feu, … Chacun s’affaire à sa tâche.
Du temps pour soi sur son vélo
A cela, s’ajoute le temps sur le vélo. Et nos quelques heures de vélo par jour sont salvatrices. C’est par exemple la première fois depuis que les petits sont nés qu’on retrouve du temps pour soi ! On ne reste pas à ne rien faire. Une fois parent de toute façon on ne connaît plus le far niente. On pédale lorsque les enfants dorment et/ou sont tranquilles bien sûr. Mais justement, à part pédaler, on se retrouve seul avec soi-même. Du temps pour penser et même pour rêver. Le summum du luxe ! Cela fait un bien fou au niveau personnel et relationnel. En effet, si on enfourche le vélo fâché, on a le temps de se calmer, de réfléchir et d’oublier après quelque temps passés seul.e à pédaler.
Jamais seuls bien longtemps
Car seuls, nous ne le sommes jamais bien longtemps ! Le fait de voyager en vélo, avec des enfants qui plus est, résulte que la plupart des personnes qui nous croisent veulent nous parler. Moi j’aime ça, car je pose aussi beaucoup de questions. Cela m’intéresse de savoir d’où viennent les gens, comment ils vivent, ce qu’ils aiment de leur environnement, ce qu’ils pensent de notre voyage, etc.
Il n’y a que lorsque nous sommes dans des endroits très reculés, que nous sommes seuls. Et on apprécie aussi. Rien de plus beau que de poser la tente en pleine nature, loin de tout, sans un bruit ou une lumière résultant de l’activité humaine, sous un ciel rempli d’étoiles, au son de la vie animale nocturne.
Bref, nous sommes dans le cas typique du voyageur. Le plus dur c’est de se mettre en route. Une fois en chemin on est pris par le voyage. De rencontres en surprises. Avec des hauts et des bas bien sûr, causés surtout par les intempéries, la difficulté du chemin ou les ennuis mécaniques. Mais jamais de regrets d’être partis.
De tous petits détails nous remplissent de paix et de sérénité : une pause au bord d’une rivière, un rayon de soleil après la pluie, un pique-nique au sommet d’un col, une soirée au coin du feu, une rencontre avec un castor, une loutre, un aigle, une fleur dans le désert, l’ombre d’un arbre, etc. Bref, ce tout plein de petites choses qui rendent infiniment heureux. D’autant plus qu’ils sont entrecoupés de moments où on sert les dents, chargés à bloc, en montée, sous la pluie, en pleine tempête ou sous le cagnard à rêver d’un rayon de soleil ou d’une brise dans le dos.
Vivre dehors, par tous les temps, être libres, vivre chaque instant intensément, se reconnecter avec Mère Nature, apprendre à connaître et à aimer ce qui avant pouvait nous faire peur, … Pour rien au monde nous n’échangerions notre place aujourd’hui.
Alors ce qui fait le plus peur, c’est le retour … Bien sûr, revoir la famille et les amis sera juste un pur bonheur. Mais on ne pourra pas revenir sans qu’on exige de nous de nous « réintégrer », de (re)prendre une vie dite « normale » au standard du mode de vie actuelle du monde occidental. C’est-à-dire : oublier que c’est la nature qui nous fait vivre physiquement et spirituellement, et penser qu’elle doit être pillée pour pouvoir posséder, si possible, plus que son voisin. Une manière de vivre et de penser dont on ne regrette presque rien. Tous les objets laissés, d’une vie remplie de tout plein de gestes et de choses inutiles et insensées …
Mais il faudra bien se poser un jour, pour les enfants, pour qu’ils fassent leur vie et créent leur propre relation en dehors du cercle de la famille. Le nomadisme ne permet pas de nouer sur le long terme. Ils rencontrent beaucoup d’enfants mais ne peuvent pas se faire d’ami.e.s. Pour le moment, ce n’est pas très grave. Les parents et la fratrie c’est ce qui comptent pour eux. Ils ont développé une vrai complicité, et même leur propre langage, mêlant français, allemand, anglais et espagnol. Et alors que nous sommes occupés aux taches primaires de préparer à manger et l’endroit où passer la nuit, ils font leur vie.
Marla et Mika font leur découverte de la nature, de leur environnement ensemble. Par le jeu, toujours. Ils escaladent, ils courent, ils sautent, ils se suspendent. Ils collectionnent des cailloux, des bâtons, des coquillages. Ils creusent dans le sable, dans la terre, dans la poussière. Ils ne se plaignent jamais de la météo. Mika adore la pluie. Il aime jouer dans les flaques et lancer des cailloux dedans. Marla ne craind pas la chaleur, elle raffole des baignades, dans un ruisseau, dans un lac, dans la mer, elle est toujours prête à sauter dans l’eau. Marla est aux anges avec son vélo. Mika le lui envie et rêve de monter sur une moto ou dans un train. Et ils ont aussi beaucoup de jeux et de délires en commun. C’est beau de les entendre piailler dans le chariot se raconter des histoires ou chanter à tue-tête.
Ça n’empêche pas qu’il y a aussi des moments tendus, des chamailles, des cris et des pleurs. Mais jamais en raison du voyage. On dirait qu’ils sont eux aussi devenus de vrais voyageurs. On change de lieu presque tous les jours. On dort dans la tente ou dans la moustiquaire, parfois, nous sommes invités à dormir dans une maison et quelques fois on se paye un motel, mais jamais ils ne se plaignent. Ils sont à l’aise partout où l’on va. Ils ont le contact facile avec les personnes et n’ont peur ni des Grizzlis d’Alaska, ni des Mygales du Mexique. Quand la tente prend l’eau par dessous ou que le vent souffle en rafale tout le sable du désert, cela les amuse.
Alors oui, c’est toute une logistique de camper et de voyager avec deux petits enfants. On est tout le temps en activité. Parfois je me prend à rêver quand je regarde les guides de cyclo-tourisme agrémentés de photos où l’on voit les cyclistes se reposant, allongés sur l’herbe ou sur un banc, savourant le repos du corps après l’effort…
Pour nous, parents-cyclo-randonneurs, le seul moment de repos physique est la nuit, lorsque les enfants dorment. Car ils dorment comme des anges. On dirait que la vie en pleine nature leur donne un sommeil profond et serein. Ils s’acclimatent avec facilité en suivant le rythme du soleil. En Alaska, ils s’endormaient au soleil de minuit pour se réveiller après une longue grasse matinée. Plus au sud, l’hiver arrivant et la nuit tombant à 17h, ils étaient dans la tente à 19h et aujourd’hui, c’est couché 21h pour profiter de la fraîcheur du soir et levé avant le soleil pour échapper aux grosses chaleurs. Comme nous n’avons pas d’électricité, le sommeil vient radicalement dès que la nuit tombe.
La nuit est donc notre seul moment de temps libre, pour le corps et l’esprit, pour nous deux ou pour écrire 🙂 ! D’où le plus grand nombre d’articles en allemand. Autant Daniel est un oiseau de nuit, autant pour moi, il est difficile de « grappiller » du temps libre sur le temps de sommeil ou du moins de position allongée (la seule position vraiment confortable et reposante quand on vit sans chaise et sans canapé :).
Il faut donc être en forme pour voyager comme on le fait. Un an est déjà passé sur les 3 ans que nous nous étions donnés au départ. Quand Marla aura 6 ans et devra aller à l’école, on s’est dit que ce serait le maximum, pour la socialiser et lui donner l’opportunité de faire sa propre vie et ses propres relations, à elle comme à Mika. Mais on ne s’est pas dit « c’est 3 ans point barre ». Avec des enfants, il faut rester flexible. Peut-être rentrerons-nous dans 6 mois, dans un an ou dans deux ? En fonction des événements, de la santé, de notre financement, etc.
Aujourd’hui, alors que nous avons sauté le pas, tenté l’aventure et réalisé un bout de notre projet fou, on ne souhaite pas encore mettre fin au rêve.
on ne peut que vous souhaiter longue vie à votre aventure! c’est déjà tellement énorme ce que vous avez fait, tout ce que vous avez dû affronter, le froid, la chaleur, le vent, la pluie, les km à “avaler”, la recherche de nourriture et d’eau, tout cela avec 2 petits enfants, encore une fois c’est énorme! mais on sent tout votre bonheur à vivre au plus près de la nature, alors vivez encore cette aventure tant que vous y trouvez du plaisir!
de grosse bises à tous les 4!
cath
Merci de nous faire partager tout cela. Continuez de vivre ce rêve et voici une piste pour l’année prochaine 😉 https://www.jaijagat2020.org/
Bon c’est à pied mais sait-on jamais 😉
Mille baisers
ah la la !! on fond de bonheur en regardant la merveilleuse photo de vous quatre en intitulé de votre récit !! Tu le décris bien Marilyne, sans rien cacher de ce qui fait notre vie à tous, les très bons moments et les difficultés !! mais voilà, votre vie c’est d’abord d’être réunis tous les quatre, ensuite ce besoin immense de proximité avec la nature !! et vos photos sont des pépites !! merci de nous les offrir, mais on sent que vous gardez une certaine prudence sur la durée de ce voyage ; gros gros bisous à vous deux et aux petits trésors !! Huguette & Gaby